Le sculpteur Myron est l’auteur de statues ou de groupes
en bronze fort admirés: le Discobole est son œuvre la plus célèbre et
l’image de cet athlète penché en avant, reposant sur la pointe des pieds, le
bras droit jeté en arrière, la tête tournée, donne une impression d’instabilité,
de mouvement qui paraît à l’image même de la vie; en fait, l’attitude est irréelle,
recomposée intellectuellement, mais elle donne une parfaite illusion et c’est
une des créations les plus belles du Ve siècle. Cependant, le principe même
de cette représentation paraît déjà vieux à cette époque, et ce n’est pas dans
ce sens que Phidias oriente son école.
Nul académisme encore : Phidias n’était point l’homme d’un seul genre, d’une seule technique, d’une seule idée. C’est lui qui, au temps même où s’édifiait le Parthénon, examinait sans doute les projets somptueux des Propylées, entrée monumentale de l’Acropole que devaient flanquer d’énormes portiques; c’est aussi lui, peut-on croire, qui discutait avec un architecte inconnu le plan de l’Érechtéion, petit bâtiment fort compliqué intérieurement qui faisait face au Parthénon et contrastait avec lui par son élégance et certains raffinements un peu précieux en opposition avec la sobriété du grand temple.
Mais d’autres tendances existaient, et vivait alors un très grand sculpteur, non pas athénien, mais argien de tradition dorienne, Polyclète.
Sa production fut peu considérable, et, pour illustrer des théories mathématiques qu’il avait conçues sur les proportions du corps humain (le traité "Les canons"), c’est presque toujours le même motif qu’il reproduisit dans ses statues de bronze : l’athlète debout, s’arrêtant dans sa marche et installé dans une attitude qui met en valeur la structure et le rapport des différentes parties de son corps. Dans son Doryphore, qui lui valut la célébrité, on peut voir la descendance des traditionnels couroi , mais les athlètes polyclétéens se distinguent de ces lointains ancêtres non seulement par la perfection de leur anatomie, mais aussi par une souplesse d’autant plus étonnante que leur auteur est parti de formules mathématiques pour les construire.
À la mort de Périclès et de son protégé Phidias se produisit une réaction générale contre l’idéal et les principes qui dominaient depuis 30 ans. La guerre du Péloponnèse, avec ses incertitudes et ses malheurs, crée un malaise général; la démagogie succède à l’ordre et le sens civique qui avait fait jusqu’alors la force d’Athènes s’affaiblit; de jeunes ambitieux comme Alcibiade se placent au-dessus des lois et chacun tend à sacrifier l’intérêt du pays au sien propre.
Les potiers développent un genre nouveau, à l’intention surtout d’un public dont ils ne s’étaient guère occupés jusque-là, la clientèle féminine. Le nombre des coupes diminue brusquement pour faire place à la fabrication de flacons, de coffrets destinés au gynécée. Les scènes peintes sur les vases d’athlétisme et de guerre s’effacent devant celles de la vie familiale ou galante. Le Peintre d’Érétrie, entre 430 et 415 à peu près, dessine de charmantes jeunes femmes à leur toilette, des fillettes jouant à la balle, les préparatifs d’un mariage.
Les arts majeurs ne suivent qu’avec quelque retard le mouvement; mais les maîtres de cette époque, Zeuxis et Parrhasios, se sont plu à représenter des sentiments émouvants ou violents. La sculpture même n’hésite pas à prendre pour thème des épisodes dramatiques, Euripide aussi jouait volontiers du pathétique, et l’influence du théâtre sur l’art est alors indéniable.
Avec la chute d’Athènes vaincue par Sparte en 404 se termine la période qui, sous le nom de siècle de Périclès, passe aux yeux de beaucoup pour la plus brillante de l’histoire artistique de la Grèce. Les tendances qui s’amorçaient durant la guerre du Péloponnèse prennent plus de force et la sentimentalité sous toutes ses formes triomphe de la logique. La religion elle-même change de caractère et les dieux les plus aimés, le plus souvent représentés sont, non pas les plus puissants, qu’on redoute, mais ceux dont on attend le salut dans la vie et surtout dans l’au-delà
Athènes n’est plus le centre d’où partent idées et formules, les artistes se tournent vers les pays d’Asie, seuls assez riches pour leur fournir une commande importante. Sur la côte anatolienne s’élèvent les édifices les plus importants :
Les architectes sont grecs, comme Scopas de Paros en particulier,
l’un des maîtres du IVe siècle; et ces sculpteurs ont dû se soumettre à certaines
exigences non helléniques de leurs clients, soit dans les thèmes, soit dans
l’esprit de la décoration. Ce contact avec l’étranger renforçait certains des
traits qui existaient à Athènes même à la fin du Ve siècle; les personnages
de Scopas apparaissent tourmentés et dans leur regard se lit la destinée romantique
d’êtres luttant contre un destin dont ils savent d’avance qu’ils ne triompheront
pas.
Les oeuvres présentés
- Doryphore de Polycléte : Il s'agit d'un soldat porte-lance de la garde
militaire. Dans cette copie romaine de 440 on sent l'insistance sur la pesanteur
du corps sur la jambe portante qui se concrétise par la hanche gauche baissée
alors que l'épaule droite est relevée, inversement, la hanche droite est relevée
alors que l'épaule gauche est abaissée. C'est ce que l'on appelle le chiasme.
Ce principe fut définitivement adopté
- Discobole de Myron (à Castel Porgiano) (450-440) : Réplique en marbre parmi
beaucoup d'autres
- Discobole de Myron (à Lachelotti) : On y observe particulièrement bien que
chaque posture du corps forme un triangle
- Temple dorique de Zeus à Olympie consacré en 467 : Périptére, cella tri-partite
à double colonnade interne. Il contenait la statue chryséléphantine de Zeus
oeuvre de Phidias, en or et ivoire, considèrée comme l'une des 7 merveilles
du monde. Le Louvre possède une maquette de ce temple et quelques métopes
- Au sud de Naples, à Pestum, se trouve un temple dorique (460) comparable à
celui d' Olympie mais beaucoup mieux conservé. La colonnade de la cella est
à 2 niveaux.
-
Sur l'acropole d' Athènes
, sanctuaire le plus vénéré de l’Attique, on peut
voir les vestiges suivants :
Chargé par Périclés de faire de l’Acropole le plus bel ensemble de la Grèce entière, Phidias fait construire le Parthénon par Ictinos. L’édifice, construit de 448 à 432, se dresse sur la partie sud de l’Acropole. Il n’est pas très vaste (69,50 x 30,85 m), mais les proportions sont parfaites. Il était entiérement peint de couleurs vives.
Tout entier de marbre pentélique, il présentait 8 colonnes
en façade et 17 sur les côtés: elles s’inclinaient légèrement vers l’extérieur
et leur diamètre s’enflait à mi-hauteur; celles placées aux angles étaient
un peu plus épaisses que les autres; ainsi se trouvait compensée l’illusion
d’optique qui aurait fait paraître amincis en leur centre des fûts exactement
cylindriques, et trop grêles les derniers supports de chaque rangée. La frise
dorique extérieure était décorée, mais, contrairement à toutes
les habitudes, une frise ionique continue cernait aussi en son sommet,
sous le portique, le mur de la pièce sacrée (cella).
Les scènes choisies présentaient toutes un caractère
religieux en rapport avec Athènes, son histoire ou sa légende :
Le parthénon fut transformé en église au 6° siècle puis en mosquée En 1687
devenue poudrière il fut gravement endommagé par une explosion qui fit s'écrouler
colonnes centrales du périptére, mur de la cella et une partie
de la toiture.
La Gréce passe sous domination macédonienne d'Alexandre puis de ses successeurs qui se partagent son empire.
Rien n’est plus factice, dans l’art, que de séparer nettement la période hellénistique de celle qui l’a précédée immédiatement. La mort d’Alexandre en 323 ne change rien aux tendances déjà décrites, et Lysippe comme Apelle ont continué après la disparition de leur protecteur à former des élèves et à produire. Cependant, par la suite, la fondation de grands royaumes et l’établissement en Asie Mineure, en Syrie, en Égypte de gouvernements grecs :
et la naissance d’une classe de hauts fonctionnaires et de riches hommes
d’affaires désireux d’embellir leurs résidences, la multiplication
des échanges culturels à travers toute la Méditerranée
et jusque loin dans l’intérieur des terres créent un climat
nouveau et des conditions qui ont sur les artistes une influence considérable.
La Grèce désormais n’est plus qu’une petite province dépourvue de rôle politique, et Athènes devient peu à peu une ville-musée que l’on visite, où l’on va se retremper aux sources, mais dont le caractère académique ne tente point les esprits les plus novateurs.
Alexandrie, presque dès sa fondation, devient le grand
centre spirituel et, avec sa population cosmopolite, avec son activité
commerciale de grand port, avec les fêtes organisées par les
Ptolémées, avec sa Bibliothèque aussi, elle attire
tous ceux qui jadis auraient fait voile vers l’Attique.
Rien ne subsiste plus de l’Alexandrie antique mais on sait que la ville
se parait de magnifiques édifices, on sait aussi qu’elle était
construite suivant un plan d’urbanisme qui paraît déjà
singulièrement moderne, avec de vastes avenues et des rues tracées
au cordeau, bordées d’immeubles à plusieurs étages.
Ailleurs, à Antioche, à Rhodes mais surtout à Pergame entre 228 et 180, des écoles artistiques se créent.
Les créations architecturales hors de ces grandes capitales sont réparties dans les provinces, dans certains sanctuaires comme Délos. Alors se multiplient les portiques, sortes d’allées couvertes dont on entoure les places publiques ou qui bordent les grandes voies, on double leur profondeur ou leur hauteur en ajoutant des supports intermédiaires qui montrent l’enrichissement des ordres anciens. Depuis la fin du Ve siècle, au dorique et à l’ionique s’était ajouté l’ordre corinthien dont le chapiteau à volutes s’entourait d’une couronne de feuillage; et c’est cet ordre corinthien, plus élégant, plus fouillé, que désormais on préfère.
Dans les grandes villes les théâtres se multiplient et se constituent non seulement sous leur forme littéraire, mais encore architecturalement. Trois éléments dans la représentation dramatique :
Développement des maisons privées qui deviennent plus confortables et plus vastes lorsque au IVe siècle la vie privée tend à l’emporter sur les obligations civiques. Les hommes d’affaires se font construire des résidences somptueuses; leurs propriétaires, pour les rendre plus agréables, les décorent. Jusque-là, c’est aux dieux seulement que l’on offrait les statues; maintenant prend naissance la sculpture d’appartement.
On compte par dizaines les répliques réduites des chefs-d’œuvre du classicisme, de Praxitèle surtout, qui travaillait plus le marbre que le bronze, et de ses imitateurs immédiats.
- Aphrodite de Cnide (350) dont il fit 2 représentations
l'une habillée et l'autre nue. La ville de Cnide choisie la "version
vêtue"
Cette oeuvre eut un succès considérable et on venait
de fort loin loin pour l'admirer; ce qui explique qu'il en existe de nombreuses
répliques romaines.
- Diane de Gabi que l'on considère comme un "écho" d'une
Artémis de Praxitéle
Les statues de Praxitéle sont presque toutes celles de femmes plus ou moins dévoilées dont il se plaisait à rendre les formes pleines et moelleuses. Les proportions sont élancées et, sur un corps très développé, les têtes, surmontées de chignons compliqués, apparaissent minces et fines: la grâce est dans le mouvement, dans les proportions; le visage, d’un profil très pur et très régulier, garde souvent, avec ses yeux petits et perçants, une expression de dureté. Praxitèle n’a pas complètement négligé le sexe fort, mais il l’a efféminé: ses Apollons , ses Amours , son Hermès ressemblent guère, dans leur pose alanguie, aux vigoureux athlètes qu’avait sculptés le Ve siècle.
Elles ne ressemblent pas non plus à celles que, renouant avec le passé, Lysippe
fondit dans le bronze. Ce sculpteur, qu’Alexandre le Grand estimait entre tous,
se considérait comme un disciple lointain de Polyclète dont il admirait le Doryphore,
ses statues vigoureuses comme son maître, dégagent cependant beaucoup
plus de souplesse et de mobilité. De proportions singulièrement élancées de
quelque point qu’on les regarde, elles semblent bouger dans une lumière qui
joue sur la saillie des muscles. La tension qui les anime n’est pas seulement
physique, mais morale. Myron, dans son Discobole , avait fixé, arrêté l’instantané,
Lysippe le saisit sans l’arrêter.. Ci-contre son Hermés
- Statue d'un apoxyoméne : athlète se grattant la peau, recouverte d'huile
poussiéreuse après la lutte, avec un racloir
- Sculpture de Kaïros en ronde bosse : Jeune homme ailé tenant une balance sur
le fil d'un rasoir, symbole de la chance qui passe et qu'il faut saisir dans
l'instant.
Parmi les œuvres de Lysippe, on cite aussi des portraits. Il fut d'une créativité exceptionnelle puisqu'on lui attribue environ 1500 oeuvres mais il n'en existe plus aujourd'hui que des répliques romaines en marbre.
Des sculptures de grand format sont fidèles à la tradition classique; la Vénus de Milo est un des meilleurs exemples de ce qu’appréciait, vers la fin du 2e siècle, la majorité du public.
.
Le goût du mouvement, l’intérêt pour les sentiments violents et passionnés avaient
commencé à s’exprimer dans l’œuvre de Scopas, le plus asiatique des sculpteurs
grecs classiques. Les monuments pergaméniens les poussent au paroxysme :
Tant que la découverte de la nécropole royale n’avait pas permis de comprendre que Verghina était le site de la première capitale de la Macédoine : Aighai, (qui sera supplantée par Pella), on s’expliquait mal la présence là d’un grand palais (104,5 m x 88,5 m). Organisé autour d’une cour carrée à péristyle dorique, il aligne sur ses quatre côtés des salles de banquets de grandeurs différentes. L’existence d’un premier étage, est attestée par le départ d’un escalier qui devait monter aux appartements privés. Le palais était bordé d’un long portique dominant le paysage. La construction, d’abord attribuée à Antigonos Gonatas (276-239), fondateur de la seconde dynastie macédonienne, celle des Antigonides, est aujourd’hui remontée au temps des derniers Argéades, depuis que l’on mesure l’extraordinaire essor, culturel aussi bien que politique, qu’a connu la Macédoine sous l’impulsion de Philippe II (359-336) pére d'Alexandre.
Parmi les 11 tombes repérées sur le site, à chambre et antichambre voûtées, (la voûte serait une réponse grecque au problème technique posé par la monumentalisation des tombes à chambre en Macédoine pour qu’elles ne soient pas écrasées par la masse de terre du tumulus), avec façade monumentale dorique ou ionique, deux étaient inviolées, dont celle de Philippe II avec son décor peint figuré en façade (grande scène de chasse) qui annonce l'importance de la découverte primordiale et spectaculaire de l'intérieur de la tombe fermée par une porte à 2 vantaux de marbre :
L’art dominant du IVe siècle fut probablement la peinture, non pas celle,
industriont on va bientôt cesser de décorer les vases, mais celle de maîtres
tels qu’ Apelle. C'est ce que révèle les découvertes spectaculaires
de Verghina car elles nous mettent pour la première fois en rapport
direct avec ce grand art perdu qu’était jusqu’ici la peinture grecque. Ces
peintures doivent être l’œuvre d’artistelle, des éminents, comme Nicomachos
et Philoxénos d’Érétrie.
Époque confuse dans son ensemble, où des artistes que ne rebute plus aucune
difficulté technique, qui se plaisent à jouer de leur virtuosité sont sensibles
à toutes les influences, multiples en ce temps de grands échanges internationaux,
mais également de mélange des styles des époques grecs antérieures. Mais
le public, dans son ensemble, reste fidèle à l’académisme; la manifestation
du pathétique et de la violence le laissait assez indifférent, ce que confirme
l’évolution de l’art lorsque tout le monde hellénique passa sous la domination
romaine.
Les Grecs, peintres et sculpteurs, continuent à travailler, d’autant
plus activement que le peuple romain, vainqueur, constitue pour eux une
inépuisable clientèle. Mais, si l’on retrouve parfois dans
leurs œuvres le souffle pergaménien, le plus souvent on ne rencontre
que des pastiches plus ou moins heureux des créations de leur passé.
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