Situons l'Égypte
On a coutume de dire "L' Égypte, c'est le Nil". Il suffit de
regarder une carte pour s'en apercevoir et passer quelques jours en Égypte
pour s'en convaincre.
En dehors du delta les terres sont fertiles de part et d'autre du Nil
sur une bande de terre qui ne dépasse jamais une dizaine de kilomètres
et souvent moins. Cette étroite bande était fertilisée
une fois l'an, en août et septembre, par de grandes crues. En effet,
les pluies diluviennes qui, aux sources du fleuve s'abattent sur les montagnes
d'Éthiopie, entraînent une énorme masse d'eau et de
boue qui se déverse dans toute la vallée. Au terme de l'inondation,
le Nil regagne son lit, abandonnant derrière lui une épaisse
couche de terre noire, propre à être cultivée. Ainsi,
les crues du Nil sont elles à la base même de la vie et de
la prospérité des anciens Égyptiens.
A l'est s'étend la chaîne arabique; à l'ouest c'est le désert de Libye; au sud également le désert. Les anciens égyptiens distinguaient la Haute Égypte dont le dieu principal était Seth et qui s'étendait de la frontière soudanaise jusqu'au Fayoum, et la Basse Égypte dont les dieux étaient Osiris et Horus et qui correspondait essentiellement au delta.
Il existe une forte opposition naturelle entre la basse et la haute
Égypte pour des raisons qui s'expliquent principalement par des
populations différentes dans l'aspect et les moeurs, et la géographie.
En Basse Égypte , c'est le delta fortement irrigué
par les 7 bras du Nil, le pays est plat à l'horizon et la mer s'ouvre
au Nord. C'est une population d'hommes à la peau claire, tournés
vers le bassin méditerranéen et l'Asie, de pécheurs,
de marins, d'agriculteurs, de commerçants . En haute Égypte,
tournée vers l'Afrique, c'est au-delà du Nil le sable, les
chaînes de montagne, et la chaleur dure et sèche; les
hommes à la peau parfois noire sont des nomades ou des sédentaires
agriculteurs ou artisans
Ces 2 régions se sont souvent
opposés par le passé, mais elles étaient vouées
à l'unité car chaque division a été catastrophique
pour l'Égypte.
Le pays se divisait en nomes
régies par des nomarques officiers du pouvoir.
Avant d'aborder l'art égyptien des différentes époques,
on doit s'interroger sur l'extraordinaire profusion et la qualité
de cet art. Le pays déjà se prête à l'approche
artistique par ses lignes droites, ses courbes molles ses grandes étendues
, l'importance de la religion incite les artistes à la recherche
et à la création, la profusion des matériaux disponibles
enfin . La pierre (grès, granit rose, schiste, calcaire, diorite,
porphyre...), le bois (palmiers, sycomores, acacias..), les métaux
(or, cuivre,...) les pierres précieuses (coralline, améthyste,
jaspe, lapis-lazuli...)
Pourquoi l'art égyptien ?
Pourquoi cet art et cette profusion ? cette abondance de monuments,
d'objets, d'images? Certes, les temples, les chapelles, leurs statues et
leurs bas reliefs commémorant les rites du culte ou les victoires
de pharaon sont des actes de foi, ce sont aussi des signes de reconnaissance
aux éléments fastes (le sycomore qui donne son ombre, la
vache nourricière, le nil...) ou néfastes (le lion, le serpent...)
afin de se les concilier.
Mais pourquoi ces tombes (pyramides royales, mastabas, tombes rupestres,
hypogées) de taille parfois immense et dont les parois sont recouvertes
d'inscriptions, de bas reliefs et de peintures et pourquoi ces statues
dans les chambres funéraires ?
Essentiellement, il s'agit d'un gigantesque "appareil" magique de
résurrection ! La pensée égyptienne avait élaboré
un système destiné à assurer la vie éternelle,
au roi dans un premier temps puis avec l'extension du culte d'Osiris,
à tous les hommes. Aussi, le corps réceptacle des éléments
vitaux devait être préservé de toute corruption donc
on l'embaumait, on le momifiait et on le plaçait dans une cuve de
pierre et dans des sarcophages.. Par ailleurs pour préserver
les éléments spirituels de l'être : le ba,
les égyptiens instituèrent le "corps de rechange" dans
lequel le ba
pouvait se glisser et conserver au mort le souffle permanent de la vie
L'Égypte
est occupée depuis le paléolithique supérieur comme l'atteste les traces de
culture et des outils datant d'environ ~18.300. Mais le développement artistique
est sensible à partir de l'époque pré-dynastique (~3.800) qui se divise en 3
périodes dites de Nagada.
L'homme
est installé dans des villages organisés, il cultive le sol et fait pousser
le blé amidonnier et l'orge. il sait peindre des traits blancs sur une poterie
rouge lissé et il sculpte des vases dans la pierre dure. Il existe déjà une
sorte de faïence bleu clair.
Ces hommes enterrent les morts dans le sable,
mais rapidement ils mettent au point la première technique de momification
qui ira en se perfectionnant jusqu'à la 3° période intermédiaire.
Nagada 1 (~ 3.800-3.500) : Poteries
rouges lustrées à décors généralement noir ou blanc (vases, tripodes, vases
jumelés..). Les motifs sont géométriques ou animaliers. Palette
à fard en schiste de forme animalière aux yeux incrustés
Nagada 2 et 3 (~3.500-3.100):
Poteries couleur crème, motifs violacés ou bistres. Le répertoire artistique
s'élargit : bateaux, défilés d'animaux, figures humaines...
Travail de la pierre : vase en brèche (conglomérat)
rouge à oreilles de suspension.
* Palettes à fard élaborées, scutiforme (en
forme de bouclier) . Colliers en pierres de couleur
* Statuettes en terre cuite ou en ivoire,
rarement en pierre et stylisées.
* Tombes en brique en Hte Egypte aux parois
ornées de peinture de paysage de couleurs dominantes noir, blanc et rouge; scènes
de lutte et de chasse
Le relief fait son apparition sur les objets sculptés : Couteau en silex du Djebel el Arak (ci-contre) avec manche en ivoire d'hippopotame, aux gravures inspirées du thème oriental du "maître des animaux".
Ce sera l'époque de l'unification
du pays et celle ou les principes hiérarchiques pharaoniques se mettent en place.
L'écriture se développe. On écrit des traités de médecine
Le roi Ménès est à l'origine de la première
unification des 2 Egyptes, il fonda sa capitale à la jonction
de la Haute et de la Basse Égypte à Memphis.
On pense qu'a cette époque les rois possédaient 2 tombeaux
comme dans le complexe de Djoser; ou la pyramide double de Snefrou (1°
roi 4° dyn); ceci s'explique par les croyances égyptiennes relatives
à la personnalité tant humaine que divine et composée
d'éléments multiples. On peut alors imaginer , par exemple,
que telle partie du corps et le ka (énergie vitale) étaient enterrés à
Abydos et le reste à Memphis
Créations dans le domaine social, administratif, artistique et intellectuel
On voit apparaître les premières conventions de base qui seront respectées pendant toute la période pharaonique . |
1° convention :En peinture, visage et jambes de profil- poitrine de 3/4 ou de face, oeil de face.
Grande palette votive de Narmer
En haut à droite la déesse Hathor, au centre le cartouche (ou Serehk),
Sous la déesse le faucon protecteur. Le personnage est le roi Narmer avec la
couronne blanche de Haute Égypte levant sa massue sur un ennemi tenu par les
cheveux. Derrière le roi son porte sandales
2°
convention: celui de la hiérarchisation des tailles,
le roi est beaucoup plus grand que son serviteur.
3°
convention : Structuration de l'espace peint ou sculpté
en registres
Série de tombes à Abydos creusées dans le roc, divisées en salles (caveau et pièces pour le matériel funéraire). Autour des tombes royales il y a souvent celles de courtisans et de dignitaires
(Abydos: Ancienne ville de la Haute Égypte, au Nord Ouest de Thèbes. Située près de This, elle servit de nécropole aux premiers pharaons. Avec le développement du culte osirien sous la Vème dynastie, Abydos devint la ville sainte d'Osiris. Elle était censée renfermer les reliques de la tête du dieu démembré par son frère Seth. La ville fut désormais un célèbre lieu de pèlerinage et garda jusqu'à l'époque gréco-romaine une grande importance religieuse comme en atteste les temples de Séthi I (le Memnoneum) et de Ramsès II (où l'on retrouva les Tables d'Abydos: liste de 76 prédécesseurs de Séthi I), et le cénotaphe de Séthi i)
Les tombes royales deviennent imposantes
et annoncent les mastabas.
Ex: Tombe attribuée au roi Den (1° dynastie) entourée de parois extérieures
à redans (alternativement entrantes et sortantes ( ou en "façade de palais"))
sur lesquelles sont alignés des têtes de taureau en terre avec des cornes véritables
A Abydos des stèles funéraires. Pharaon en ivoire avec la couronne blanche, vêtu du manteau de la fête Heb-Sed (jubilé trentenaire du règne).
4 bracelets venant d'une momie de la tombe du roi Djer (2° dynastie) confectionnés en turquoise, or, perles, améthystes et lapis-lazuli
A la fin de l'époque thinite apparaissent les sculptures sur pierre de grande dimension
L'architecture, art majeur, se développe magistralement
grâce à l'emploi de la pierre.
La statuaire se développe dans les temples funéraires
ou les serdab (pièce sans issue réservée aux
statues du défunt dans les mastabas), les corps restent assez conventionnels
mais les visages sont très réalistes. Sous les 5 et 6°
dynasties cette tendance réaliste devient plus humaine voire intimiste.
Dans les arts graphiques, foisonnement de scènes de la
vie quotidienne en bas reliefs peints sur les murs des chapelles et mastabas
(travaux agricoles, chasse, pèche, travaux des artisans, promenades,
concerts et danses...).
Dans les arts mineurs développement de la vaisselle de
granit, d'albâtre ou de schiste. Parures et meubles.
Le complexe funéraire de Djeser (3° dynastie) à Saqqarah prés de Memphis, capitale de l'époque, est révélateur du perfectionnement des techniques de construction . Usage exclusif de la pierre du au génial architecte Imhotep (qui était également médecin), structure pyramidale permettant de surélever le caveau, multiplicité des édifices souvent factices , aménagement du complexe avec voies d'accès, cours..
Le complexe du pharaon Djeser (3° dynastie) comporte 14 simulacres de porte et une seule réelle. Le mastaba lui-même a été agrandi à plusieurs reprises et surélevé jusqu'à 6 degrés. Les colonnes des temples sont fasciculées (botte de roseaux liés) sans chapiteau et reliées par des murs
Dans la grande
cour (150m x 220m environ) prés de la tombe sud, le "mur aux cobras"
symbole royale
Temple T ???
à colonnes cannelées à coté de la pyramide
Apparition
du tore d'angle et de la corniche à gorges
Dans la maison
du Nord un mur à colonnes et chapiteaux papyriformes
Derrière
la pyramide à 6 degrés du roi se trouve le Serdab
: chambre aveugle contenant la statue de Djeser; avec 2 petits trous à
hauteur des yeux permettant de voir à l'extérieur
Pyramide à 7 degrés à Meidoum (70m de haut)
construite sous Snéfrou (4° dyn). Dans la dernière phase de construction
les degrés de la pyramide ont été comblés pour
obtenir des faces lisses comme le seront les futures pyramides.
4° convention : Dans ce complexe
, sur la face est, un petit temple (2 salles et une cour) mène par
une grande allée au temple bas. Les pyramides futures auront également
cette présentation architecturale d'un temple haut relié
par une allée a un temple bas (dit "temple de la vallée")
généralement aboutissant au Nil.
Keops, Kephren et Mykérinos construisent les grandes pyramides du plateau
de Gizeh .
Dans ces pyramides les couloirs d'accès traversent la masse de la pyramide
pour accéder aux chambres dans la pyramide elle-même à une hauteur plus ou moins
élevée; alors que dans les pyramides plus anciennes les couloirs d'accès étaient
creusés de l'extérieur de la pyramide pour s'enfoncer dans le sous-sol de celle-ci.
Le sphinx; attribué à Kephren, se situe le long de la chaussée entre les temples haut et bas de sa pyramide.
Barque solaire de 43 m de long découverte en pièces détachées dans l'une des 4 tranchées creusées sous le pavement qui entourait la pyramide de Kéops . Les planches de cèdre comportaient chacune des encoches creusées dans l'épaisseur du bois permettant d'y passer des cordages pour l'assemblage. L'ensemble a été remonté récemment en respectant ce principe, en quelque sorte "cousu" sans aucun clou ni mortaise !!!!
Tête de Didoufri (fils de Keops) coiffé du nemés et du cobra
Statue de Khefren assis sur un trône le dieu faucon posé sur le haut du dossier et entourant le pharaon de ses ailes protectrices
Pyramide rhomboïdale de Snéfrou à changement de pente, avec ces 2 temples.